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Redéfinir l’architecture pour réduire les émissions de CO2

11 avril 2024

À quoi peuvent ressembler les maisons et communautés saines et à faibles émissions de carbone ? L’été dernier, nous avons eu droit à un bel exercice en la matière avec le projet Living Places, réalisé à Copenhague (Danemark), qui était alors Capitale mondiale de l'architecture. Living Places englobait sept prototypes présentant plusieurs solutions : cinq pavillons ouverts et deux maisons achevées.

 

Ce projet visait à démontrer qu'il est possible diviser par trois les émissions de CO2 par rapport à une maison unifamiliale danoise moyenne, avec un concept réalisable et un budget abordable. Living Places Copenhagen est une initiative conjointe de VELUX, EFFEKT et Artelia, qui repose sur une vision claire : donner un rôle actif à l'industrie de la construction et montrer qu’en repensant les bâtiments, on peut contribuer à résoudre certains des défis climatiques mondiaux. Le concept s’appuie sur cinq principes de base : les logements doivent être sains, abordables, simples, partagés dans le temps et réalisables. Le secteur de la construction, les maîtres d’ouvrage et les architectes jouent un rôle clé dans la réduction de l'empreinte carbone, étant donné que le secteur du bâtiment est responsable de 34 % de la consommation mondiale d'énergie et de 37 % des émissions mondiales de CO2.

 


Living Places Copenhagen lors de l’événement Capitale mondiale de l’architecture à Copenhague. Photo © EFFEKT

 

Harpa Birgisdottir, docteur et professeur à l’AAU BUILD, affirme que nous avons d’ores et déjà les matériaux et la technologie nécessaires pour réduire les émissions mondiales de CO2 environ de moitié par rapport aux niveaux actuels : "Le secteur de la construction commence à peine à s'intéresser à l'impact climatique des matériaux. L'utilisation de matériaux de construction qui réduisent l'incidence climatique recèle un potentiel énorme, que nous n'avons pas encore totalement exploré. Et pourtant, la technologie existe."

 

Pour Harpa Birgisdottir, la solution réside dans l'adoption de pratiques durables. Nos espaces de vie ont eux aussi besoin de matériaux produits de manière durable. Elle estime essentiel de s'assurer que les matériaux que nous achetons proviennent de sources responsables, mettant l'accent sur des méthodes de production durables. Construire durablement signifie aussi ne pas utiliser de matériaux inutiles ou en trop grande quantité et prévoir des solutions flexibles pour d’éventuelles fonctions futures : "Il existe une solution, c’est vrai, mais nous ne devons pas non plus perdre de vue l’importance de la parcimonie. Nous devons utiliser moins de matériaux."

 


Une photo de l’exposition Living Places dans le cadre de l’événement Capitale mondiale de l’architecture à Copenhague. Photo © Adam Monk

 

Analyse du Cycle de Vie


Le projet Living Places Copenhagen a réalisé une analyse complète du cycle de vie (Analyse du Cycle de Vie ou ACV). Les émissions de CO2 de chaque matériau, chaque concept et chaque technique de construction ont été soigneusement étudiées et comparées à celles d’un ménage danois typique.

 

Une fois les calculs de chaque scénario réalisés, le consortium a créé le concept Living Places, qui permet de construire une maison unifamiliale émettant seulement 3,8 kg eq CO2/m²/an, avec vérification par des tiers de l'AAU BUILD – Department of the Built Environment). Ce résultat est plus de trois fois inférieur à la nouvelle législation danoise sur la construction de 2023, qui fixe un maximum de 12 kg de CO2/m²/an (la valeur imite ne s'appliquant pas aux maisons unifamiliales). Toutes les nouvelles constructions avec une surface au sol supérieure à 1 000 m² sont limitées à 12 kg d'équivalent CO2 par m² et par an, et des limites d'émissions similaires seront appliquées à toutes les nouvelles constructions à partir de 2025, quelle que soit leur taille. Pour réduire les émissions de CO2, le projet remplace les matériaux de construction lourds comme le béton et la brique par des matériaux biogènes, tels que le bois.

 

"Le Danemark dispose désormais d'une réglementation en matière de construction, avec une méthodologie définie pour calculer l'empreinte carbone des bâtiments tout au long de leur durée de vie”, explique Harpa Birgisdottir. “Pour préparer la législation, BUILD a concentré ses recherches sur la mise à disposition de données et d'informations sur les émissions de carbone des bâtiments au Danemark, y compris les maisons unifamiliales donc, sur l’ensemble de leur vie."

 


Matériau du plafond : contreplaqué de pin. Photo © Adam Monk

 

Parcimonie et matériaux biogènes : éléments clés de la réduction des émissions de CO2.


Les habitations entièrement fonctionnelles du projet Living Places Copenhagen reposent sur une ossature bois, avec une ventilation naturelle et des fenêtres en bois. Le plafond est en contreplaqué de pin et les murs en fibro-plâtre.

 


Matériau des murs : fibro-plâtre. Photo © EFFEKT

 

Selon Harpa Birgisdottir, les considérations financières ont encore trop souvent la priorité et on accorde trop peu d'attention à l'impact environnemental des matériaux. Par conséquent, la première mesure à prendre est d'optimiser les matériaux, d'éviter les excès inutiles et de s'assurer que nous en utilisons la bonne quantité. Nous jetons ainsi les bases pour réduire considérablement notre empreinte carbone et mettre en place une approche plus durable de l'architecture et de la construction.

 

"Cela peut sembler simpliste de préconiser l'utilisation exclusive de matériaux biosourcés, mais ce que je veux vraiment souligner, c'est que l'optimisation de la consommation des matériaux devrait être notre principale préoccupation”, précise-t-elle.

 


La structure porteuse en bois. Photo © EFFEKT

 

Living Places, les premières conclusions

 

L'analyse met en évidence l'immense potentiel que représentent l’exploration de la géométrie, l’optimisation des matériaux et l’inclusion de matériaux biogènes pour diminuer les émissions de CO2. Surtout lorsque la démarche est assortie d’une bonne compréhension des différences entre les différents matériaux et de l'optimisation du marché.

 

Une question cruciale se pose cependant : les candidats à la construction sont-ils demandeurs de solutions durables et les architectes sont-ils prêts se former aux outils d'optimisation disponibles ?

 

L’analyse des barrières éventuelles met en lumière deux obstacles majeurs. Premièrement, les clients tout au long de la chaîne de valeur, les architectes, les ingénieurs-conseils, les entrepreneurs, etc. doivent être demandeurs de bâtiments durables. Deuxièmement, l’information peut être problématique, car il peut être difficile de s'y retrouver dans la complexité des divers éléments et solutions.

 

Article de Klaus Hybler, traduit et retravaillé par Jan Hoffman

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